« When your muscles are properly developed you will as a matter of course, perform your work with minimum effort et maximum pleasure”. J. Pilates (1883-1967)
Que signifie somatique ? Le mot vient du grec “soma” qui signifie “corps”, on l’oppose à “psychique” pour désigner ce qui concerne exclusivement le corps. Il s’agirait d’une “intelligence” ou d’un “savoir” proprement corporel, peut-être un “savoir être” … Ressentir son corps de l’intérieur, être attentif aux fluctuations sensibles des appuis, des transferts de poids, des angulations articulaires, du tonus musculaire engagé, de la tactilité au sens large… et être ainsi à même d’ajuster et d’adapter son effort pour accompagner le corps dans sa recherche constante d’équilibre des fonctions (homéostasie).
Les pratiques dites somatiques couramment citées sont la méthode Feldenkrais, l’Eutonie, la méthode Alexander, le Body Mind Centering … Souvent, il y est question d’équilibre, d’écoute du corps pour “déconditionner”, défaire des habitudes de mouvement néfastes, désapprendre pour réapprendre; non pas pour se re-conditionner différemment mais pour savoir faire varier les réponses et s’adapter.
Il y est question aussi, plus ou moins suivant les techniques, d’harmoniser le tonus musculaire : on ne cherche pas à aller au maximum de son effort, on recherche l’effort “juste”: “quality vs quantity” .
Le Pilates n’est pas à l’heure actuelle associé à ces pratiques, on le range plutôt du côté des pratiques sportives complémentaires, préparatoires ou rééducatives ou on l’appelle “gym douce”. C’est une option. Mais alors pourquoi insister sur cet aspect somatique ou pourquoi le privilégier ?
Qu’est-ce que cela apporte dans l’enseignement?
Pour moi cela change complètement le point de vue et la manière de pratiquer. On ne va pas partir de l’extérieur, d’une forme à atteindre. Nous rejoignons en cela la définition que donne Thomas Hanna (1928-1990), philosophe et théoricien du mouvement, d’une pratique somatique.
L’approche a été définie clairement comme un moyen de rééducation via le système neuro-musculaire suite à des douleurs corporelles chroniques et des blessures récurrentes. Le corps et l’esprit ne font qu’un (cela était déjà dans l’air du temps depuis Delsarte (1811-1871) dont les idées ont bien imprégné toute la danse moderne du début du 20ème siècle et auxquelles Pilates a aussi été sensibilisé).
La douleur n’est jamais souhaitée ou recherchée ; nous sommes à l’opposé du « no pain no gain ».
La lenteur (ou en tout cas l’absence d’impact), l’écoute, la modulation du tonus musculaire en fonction du type d’exercice et d’effort me semblent complètement appartenir au registre du Pilates. Il ne s’agit pas de renforcement musculaire pur et dur mais d’une éducation à l’engagement musculaire adapté et respectueux de l’ensemble du corps.
Privilégier une approche somatique du Pilates permet d’écouter ce “corps parlant” et de partir de lui, d’en restaurer la fonctionnalité, c’est à dire l’adaptation aux contraintes de l’environnement.
La sédentarité est une contrainte, un stress pour le corps et réapprendre à bouger et à engager son tonus musculaire de manière pertinente constitue un des objectifs principaux du Pilates, à mille lieues d’une préoccupation esthétique ou d’une activité à la mode.
La pratique avec petit matériel va venir cibler, préciser, aiguiller la perception vers plus de finesse, de spécificité, de différenciation, dans l’effort.
Elle va permettre d’enrichir les sensations et ainsi de pouvoir faire varier la réponse /les réponses à apporter lors d’un effort mais aussi bien sûr dans le quotidien; je dis souvent aux élèves : vous avez un corps tout le temps et pas uniquement pendant le cours…
En savoir plus sur Thomas Hanna